Le 6 mai, deux mois après le début de la crise sanitaire et économique, en direct sur une chaîne d’information en continu, le Président de la République, en présence du Ministre de la Culture, a dévoilé certaines pistes ou orientations d’un Plan pour aider le monde de la Culture qu’il reconnaît et qu’il sait être fortement touché par le confinement sanitaire et les incertitudes d’un calendrier de retour à la normale.
Ces annonces ont été faites en direct au terme d’un échange en visioconférence avec une douzaine de personnalités de la Culture de différents domaines.
L’une des mesures annoncées, la plus attendue sans doute, était celle concernant les droits à l’assurance chômage des intermittents du spectacle. Le chef de l’Etat a annoncé la prolongation jusqu’à fin août 2021 des indemnités de chômage, qualifiant cette année comme une année blanche. Ces mesures sont indispensables à la survie de certains secteurs : musique, spectacles vivants, audiovisuel. La solidarité entre partenaires d’un même écosystème va de soi et les auteurs bénéficieront -de manière indirecte- de ces dispositions.
Bien d’autres sujets ont été abordés lors de cette prise de parole du Président, tous avaient leurs raisons d’être, voire leurs impérieuses nécessités : dispositifs de soutien à destination du cinéma et de l’audiovisuel, aux festivals, dotation financière pour le CNM (dont les auteurs devront veiller à ce qu’une part finance les mesures d’urgence en leur faveur), mesures concernant les salles et producteurs de spectacles, reprise et accélération de la transposition de deux directives européennes (SMA et droit d’auteur), etc.
Bien sûr toutes ces annonces nécessiteront, pour en évaluer la pertinence et l’efficacité, de savoir pour beaucoup d’entre elles les chiffrages prévus par le gouvernement.
Tout en saluant l’initiative et l’importance du symbole de l’intervention présidentielle, le SNAC veut surtout rester ancré sur la réalité des mesures annoncées et sur celles qui sont susceptibles de modifier la vie des auteurs.
Il y a un an, jour pour jour ou presque, Emmanuel Macron, lors d’un déjeuner à l’Elysée avec les représentants de tous les maillons des industries culturelles, déclarait que les auteurs devaient être placés au centre des dispositifs de la Culture.
L’intervention du 6 mai est-elle en adéquation avec cette déclaration ?
Pour les mesures concernant directement les auteurs, nous avons entendu et retenu :
- L’annonce du Président concernant une exonération de cotisations sociales pour les auteurs pour une durée de « 4 mois ». Nous rappelons que l’idée d’une baisse ou d’une exonération des charges sociales et fiscales a été portée par le Snac (et d’autres organisations) sans être entendue à ce jour. L’exonération devra être définie et expliquée dans sa durée limitée, son périmètre et ses modalités, elle ne saurait se traduire par une perte de droits pour les artistes-auteurs. Par ailleurs, le bénéfice réel d’un tel dispositif (aussi limité dans le temps) devra être évalué pour les auteurs dont les revenus ont ou auront fondu lors de la crise.
- L’annonce du Président selon laquelle : « L’école pourrait fournir un réservoir d’activités pour les artistes intermittents et les créateurs ». Si nombre d’auteurs ont recours à certaines interventions dans le milieu scolaire pour compléter le bas niveau de leurs revenus, ces activités ne ressortent en aucun cas de façon automatique de leur vocation ou de leur professionnalisme. Si les auteurs n’ont pas vocation à se substituer aux animateurs sociaux–culturels ou aux enseignants artistiques, certains d’entre eux seront sans doute intéressés et volontaires, mais uniquement dès lors que les conditions juridiques et financières seront acceptables. Car les services de l’Etat doivent encore finaliser et publier la circulaire sur les revenus accessoires des artistes-auteurs, circulaire bloquée depuis plus d’un an par les guerres ministérielles… entre Culture et Sécurité Sociale.
- L’annonce du lancement (sans précision de date) d’un “grand programme de commandes publiques” dans le secteur artistique (et pour les auteurs âgés de moins de 30 ans) que ce soit pour les métiers d’art, le spectacle vivant, la littérature, les arts plastiques”. Cette annonce a priori intéressante nécessite des précisions, entre autres : quel est le budget mis en œuvre ? Quels domaines artistiques seront-ils concernés ? Quand ces commandes seront-elles déclenchées et pour quelle période ?
Après les idées lancées par le Président de la République, nous attendons donc toutes les précisions indispensables et l’ouverture des discussions et négociations entre l’État et les organisations professionnelles. Nous serons évidemment vigilants quant aux engagements pris.
Le SNAC prendra sa part de responsabilité dans cet effort collectif de construction, y compris en portant des idées différentes ou complémentaires et en veillant à ne pas créer des casse-tête administratifs à cause des cadres contraints, jamais adaptés aux situations particulières et variées des professionnels de la création…
Il est certain que pour les auteurs la crise et les effets de la crise sur leur travail et sur leurs rémunérations par nature différée s’étaleront sur plusieurs années. Tout reste à faire pour élaborer un plan qui permette d’accompagner les auteurs dans la période : adaptation effective à tous les auteurs du dispositif national Fonds de solidarité (TPE), dispositifs d’aides directes aux auteurs pour la création, baisse ou annulation de charges sociales et/ou fiscales à court terme et sur 3 à 5 ans, création d’un fonds de garantie sur les droits d’auteur impayés (y compris dans le cadre des procédures collectives menées devant le tribunal du commerce), mise en œuvre d’un cadre social et fiscal adapté, élaboration de règles visant à empêcher que la rémunération des auteurs soit une simple variable d’ajustement des créations culturelles, mesures d’aides aux entreprises culturelles conditionnées par le parfait règlement des droits d’auteur.
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