Chers auteurs, chers compositeurs,

J’ai fait un rêve…

L’Urssaf, la Caf, et Pôle Emploi me répondaient au téléphone. Chaque fois, la personne que j’avais au bout du fil, et qui s’appelait « Référent » de son prénom, « Artistes Auteurs » de son nom de famille, avait la bonne réponse à mes questions. « Référent » connaissait sur le bout des doigts toutes les règles sociales et fiscales qui s’appliquent à nous. ASS, RSA, BNC, TS et autres projets de loi de financement de la Sécurité sociale n’avaient pour lui aucun secret ! Et figurez-vous que « Servicepublic.fr » ne disait plus autre chose que « Impôts.gouv.fr. ».

Et puis je me suis réveillée.

Donc… Après moult rapports (Racine, Bois – Le Grip, Sirinelli), le plan Artistes Auteurs est dévoilé. Soutien économique aux auteurs poursuivi (combien, pour qui, combien de temps ?). Délégation aux politiques professionnelles et sociales en déploiement (jusqu’à où ?). Création d’un observatoire statistique annuel. Meilleur accès aux droits sociaux et, promis, réouverture des négociations collectives (livre, audiovisuel, cinéma). Etc. Encore des mots, toujours des mots, les mêmes mots, dirait Dalida. Certes. Considérons tout de même qu’ils sont encourageants et qu’ils inaugurent un long cycle de travail dans lequel le Snac prend déjà sa part.

Devant les assemblées, dans les réunions de concertation ou lors de nos rendez-vous avec les représentants de l’État, nous plaidons, et plaiderons, la cause des auteurs et des compositeurs. Conditions de création. Extension des accords obtenus. Harmonisation des règles qui nous concernent, dispersées dans différents droits, codes, circulaires…

Et notre organisme de Sécurité sociale ? me direz-vous. Juré, craché, il sera recomposé après une enquête de représentativité. Piste figurant dans le rapport Racine, où nos représentants sont issus

(…) des organisations jugées représentatives à l’issue d’élections ou bien d’autres acteurs reconnus de longue date (en particulier des associations telles que la Société des gens de lettres, forte de sa longue histoire et du nombre de ses adhérents, ou la Maison des Artistes, etc.) (…)

Bref, entre des élections dont l’objet (représentativité à quoi ?) et les modalités questionnent encore (suffrage censitaire, que d’aucuns souhaitent réserver aux seuls syndicats) et une enquête (courante chez les indépendants et ouverte à tout type d’organisation), notre ministre a tranché.

Que notre représentation affiche la diversité de nos secteurs, pratiques, et métiers paraît sain. Car l’auteur type n’existe pas. Une diète unique pour des métabolismes différents est rarement efficace. Nés en 1946 (notre papa s’appelle Henri Jeanson, nos mamans René Fauchois et Georges de Wissant, et Jean Cocteau, je crois, fut l’un de nos tauliers) nous sommes bien placés pour le savoir : les cases, cages et autres formatages ne siéent pas toujours aux auteurs. Car c’est bien souvent pour ne pas être enfermés dans des boîtes que nous avons choisi la création.

Réjouissons-nous aussi de la créativité de nos groupements, qui nous concoctent des publications, séminaires et autres webinaires sur des sujets aussi divers que les relations auteurs-éditeurs, les conditions de la création musicale, et bien d’autres sujets en maturation. Pourquoi, d’ailleurs, ne pas nous pencher prochainement sur la question des assignations identitaires ?

Et la négociation collective ? me direz-vous. Comment va-t-elle ? Eh bien oui, elle pourrait mieux se porter. En musique, le code des usages et des bonnes pratiques doit encore être étendu dans le CPI. Dans le livre, les renégociations des accords de 2014, espérées depuis 2019, et les discussions sur le partage de la valeur, semblent se profiler. Minimum garanti non remboursable et non amortissable, c’est notre credo (un genre de prime de commande ou d’inédit). Le temps de travail étant décorrélé de son résultat, les œuvres, où situer la valeur ? Peut-être dans l’exclusivité de la cession, sa durée, l’immobilisation de l’œuvre. Parce que le temps… comment le compter sans jugement de valeur ou aberration ?

Aberration aussi que la polarisation observable sur maints réseaux, dits sociaux, où le Snac, ses représentants, et d’autres personnes ou organisations sont attaqués, voire diffamés, pour délit de liberté (de ton, d’expression, de contradiction). La parole des auteurs est plurielle au Snac et le débat est notre moteur. Nous le pratiquons de longue date et restons ce syndicat qui rassemble tous ceux qui font métier d’écrire, d’illustrer ou de composer.

Indépendance et liberté, sans sectarisme, dogmatisme ou invective. Telles sont les valeurs que nous défendons, et que nous réaffirmerons aussi souvent que nécessaire.

 

Éditorial de la Présidente du Snac, Bessora, dans le Bulletin des Auteurs n° 145, avril 2021.

Photo de Bessora. Crédit : Jean-Hugues Berrou.

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